Figure 3. Différentes formes et tailles d’oreilles chez certaines espèces de chauves-souris. Les chauves-souris peuvent se suspendre la tête en bas sans déployer d’effort, en partie grâce à un tendon spécial. Le poids de l’animal fait en sorte que le tendon referme les griffes sur la surface d’appui. Le système circulatoire des chauves-souris est également muni de valves qui évitent l’accumulation de sang dans leur tête. Ces animaux nocturnes dorment ainsi enveloppés dans leurs ailes afin de conserver leur énergie. Pour s’envoler, elles n’ont qu’à se laisser tomber.
Écholocation
Toutes les chauves-souris au Canada utilisent un système de localisation particulier : l’écholocation. Elles émettent des sons très aigus à l’aide de leurs cordes vocales. Ces ultrasons transmis par la gueule pour la majorité des espèces (sauf Corynorhinus townsendii, cette espèce pouvant transmettre ces sons par son museau!) ont une fréquence oscillante entre ≈ 8 et 120 kilohertz (kHz). La plupart des ces sons sont imperceptibles pour l’oreille humaine qui perçoit des fréquences de l’ordre de 0,02 à 20 kHz environ. Au Canada, seules la chauve-souris tachetée (~12 kHz) et la chauve-souris cendrée (~20 kHz) peuvent émettre des ultrasons de moins de 20 kHz, soit une fréquence perceptible par l’homme.
La chauve-souris utilise l’écholocation pour se diriger et chasser ses proies. Elle obtient des informations sur la direction, la distance, la taille et même sur la texture de l’insecte.
Image adaptée de l’Arizona State University - Ask A Biologist Les ondes sonores qui sont propagées se répercutent sur les éléments qui les entourent et reviennent vers les chauves-souris qui les perçoivent grâce à leurs oreilles (fig. 4). Le cerveau analyse le retour des ondes et permet aux chauves-souris d’obtenir une image mentale du paysage environnant. Plus un objet est proche et plus l’onde revient rapidement.
Chaque espèce a son propre cri. Cependant, chez une même espèce, les sons émis vont varier d’un individu à l’autre selon les activités telle que la sortie du gîte ou les différentes étapes d’alimentation : la recherche, la détection, l’approche et l’attaque de la proie. Les cris varient également selon le type d’habitat et d’environnement dans lesquels les chauves-souris se trouvent. Les biologistes utilisent ces cris, que l’on nomme sonagramme, pour identifier les espèces de chauves-souris lors d’inventaire acoustique avec des appareils spécialisés pour enregistrer des ultrasons.
Alimentation
©Brock Fenton
Toutes les chauves-souris du Canada sont insectivores. Elles localisent leurs proies par écholocation. Il peut y avoir deux périodes de chasse en une nuit : la première débute peu après le crépuscule et peut se poursuivre jusqu’à 5 heures après le coucher du soleil. La seconde période a lieu plus tard dans la nuit. Elles sont les principaux prédateurs des insectes volants nocturnes. Une seule petite chauve-souris brune est capable de manger l’équivalent de son poids en insectes, soit environ 600 par heure et ce, en l’espace d’une seule nuit. Elles peuvent capturer des insectes tant au vol qu’au repos et elles chassent généralement au-dessus des plans d’eau, à la cime des arbres et près des sources lumineuses attirant les insectes.
Par conséquent, les chauves-souris jouent un rôle important dans l’écosystème et par la même occasion, elles rendent de grands services écologiques à la société. En effet, parmi les insectes dont elles se nourrissent, certains sont jugés nuisibles pour l’agriculture et la foresterie. Il est facile d’imaginer le nombre colossal de papillons de nuit qui ont été mangés par les chiroptères lors des grandes épidémies de tordeuses du bourgeon de l’épinette au Québec. Finalement, avoir des chauves-souris à proximité de sa demeure ou de son chalet est une solution efficace et naturelle pour réduire le nombre d’insectes indésirables dans son environnement immédiat sans l’utilisation d’insecticides ou de pesticides.
Structure corporelle et mode de vie
Plusieurs aspects concernant la structure corporelle des chauves-souris ont été utilisés pour établir des suppositions sur leur mode de vie et l’utilisation de leur habitat. Bien que les relations ne soient pas parfaites, quelques suppositions raisonnables peuvent être établies en fonction de la taille, de la forme des ailes et des cris d'écholocation distincts de certaines espèces de chauves-souris. Il est préférable d’illustrer ces influences comme relatives plutôt qu’absolues.
Les plus grandes chauves-souris doivent voler plus rapidement que les plus petites pour se maintenir en vol et elles ont tendance à faire preuve de moins de manœuvrabilité. Cela signifie que les plus grandes chauves-souris sont plus susceptibles de se nourrir dans les zones dégagées de végétation, telles que les lisières de forêt et les espaces ouverts.
La taille des ailes influence également où et comment les espèces de chauves-souris volent. Les chauves-souris ayant des ailes avec de grandes surfaces par rapport à leur taille sont en mesure de voler lentement avec une bonne maniabilité. Cependant, le coût énergétique de leur vol est relativement élevé. En revanche, les chauves-souris ayant des ailes avec de petites surfaces par rapport à leur taille peuvent voler plus vite avec une faible maniabilité. Le coût de leur vol est relativement faible, c'est-à-dire qu'elles peuvent parcourir de longues distances avec peu d'énergie.
La forme des ailes est également importante. Les espèces de chauves-souris aux ailes relativement longues et étroites ont tendance à voler vite et droit. En revanche, les ailes courtes et larges permettent à une espèce d'acquérir une plus grande manœuvrabilité.
Enfin, il y a l'influence de la structure des cris d'écholocation. Les appels à plus haute fréquence parcourent des distances plus courtes, mais permettent de détecter de plus petits objets et proies. À l'inverse, les appels à plus basse fréquence voyagent plus loin, mais permettent seulement de détecter des proies ou des objets de plus grande taille.
En combinant tous ces aspects, les grandes espèces de chauves-souris ont tendance à avoir des ailes longues et étroites avec des surfaces plus petites par rapport à leur taille corporelle en combinaison avec des cris d'écholocation à basse fréquence (telles que la chauve-souris cendrée). Ces espèces ont tendance à se déplacer dans les espaces ouverts et à se nourrir de gros insectes et ont la capacité de migrer sur de longues distances. À l’inverse, les petites chauves-souris ont tendance à avoir des ailes courtes et larges avec des surfaces plus grandes par rapport à leur taille corporelle en combinaison avec des cris d'écholocation à haute fréquence (par exemple, la chauve-souris de Californie ou les Myotis). Elles ont tendance à faire preuve de manœuvrabilité et à voler lentement dans des espaces denses pour attraper de petits insectes. Les migrations s’effectuent généralement sur de courte distance.
Les chauves-souris migratrices
Les espèces dites « migratrices de longues distances » passent l’hiver plus au sud, mais reviennent sous nos latitudes durant la saison estivale. Certaines chauves-souris argentées ont aussi été observées à migrer en grand nombre de l’Alberta vers la Colombie-Britannique. Elles peuvent hiberner dans des arbres creux, dans des couches de feuilles mortes ou alors rester actives.
Durant l’été, les migratrices utilisent les arbres pour s’abriter, mais elles peuvent à l’occasion se retrouver dans nos bâtiments. Jusqu’à présent, aucun cas de syndrome du museau blanc n’a été répertorié chez ces espèces de chauves-souris.
Pour plus d’informations vous pouvez également consulter le document ci-dessous: Feuillet Participant
Les chauves-souris résidentes
Les espèces dites « résidentes » passent l’hiver dans ce qu’on appelle un hibernacle, c'est-à-dire qu’elles hibernent dans des mines abandonnées, des grottes naturelles ou encore des crevasses rocheuses. C’est pour cette raison qu’on les appelle aussi « chauves-souris cavernicoles ». Pendant l’hiver, ces chauves-souris réduisent leur température corporelle autour de 3 à 6°C afin de diminuer les dépenses énergétiques compte tenu de l’absence de nourriture durant cette période. Elles doivent donc trouver des endroits adéquats pour maintenir cette température.
Les espèces de chauves-souris résidentes de l’est du Canada sont touchées par une infection fongique; le syndrome du museau blanc (SMB ). Cette infection se développe uniquement l'hiver dans les hibernacles et affecte les chauves-souris en augmentant le nombre de réveils de sorte que celles-ci meurent d’épuisement.
Durant l’été, certaines espèces cavernicoles utilisent les bâtiments pour la mise bas et l’élevage de leurs petits. Elles peuvent également nicher dans les cavités et sous l’écorce des arbres morts ou vivants.
Rôles des chauves-souris dans les écosystèmes du Canada
Les chauves-souris sont particulièrement importantes puisqu’elles sont le principal prédateur des insectes nocturnes (ex. papillons de nuit). Les chauves-souris consomment de très grandes quantités d'insectes. Un individu consomme en moyenne 600 insectes à l’heure, soit l’équivalent de son propre poids en une nuit! ;
Puisque les espèces du Québec sont strictement insectivores, elles contrôlent en partie les populations d’insectes. Elles nous rendent également des « services écologiques », comme la diminution des dommages aux récoltes causés par les insectes nuisibles. Elles agissent ainsi comme des « insecticides naturels » ;
En consommant des insectes ravageurs, il a été démontré que les chauves-souris réduisent la quantité de larves d’insectes ravageurs dans les cultures de maïs et augmentent ainsi le rendement des cultures (Maine et Boyles, 2015). On estime que le déclin des populations de chauves-souris à cause du syndrome du museau blanc en Amérique du Nord pourrait entraîner des pertes agricoles estimées à plus de 3,7 milliards de dollars par année (Boyles et al., 2011) ;
Leurs fèces (guano) peuvent être utilisées comme engrais naturel ;