L’écholocalisation est une technique que la plupart des chauves-souris utilisent afin de localiser et caractériser les éléments dans leur environnement. Toutes les espèces présentes au Canada utilisent ce mode d’orientation.

Cette technique prend source au niveau du larynx où l’animal produit des sons très aigus, que l’on nomme ultrasons. Grâce à la production de ces sons et l’écoute de leurs échos, les chauves-souris peuvent se déplacer et chasser dans l’obscurité (Figure 1).

Figure 1 : Écholocalisation. Image adaptée de l’Arizona State University –Ask A Biologist

À travers le monde, les chauves-souris ont acquis, au niveau de leur faciès, différentes adaptations morphologiques hors du commun leur permettant d’optimiser la réception de leurs ultrasons (Figure 2).

Figure 2 : Morphologies des chiroptères, © Ernst Haeckel — Kunstformen der Natur (1904)

À titre comparatif, la voix humaine crée en moyenne des ondes sonores comprises entre 125 et 210 Hertz (Hz) tandis qu’une chauve-souris génère des ondes comprises entre 15 000 et 150 000 Hz. Dans la plupart des cas, ces sons se retrouvent alors à l’extérieur des fréquences audibles par l’être humain. L’écholocalisation permet aux chauves-souris de surpasser l’efficacité de leur vision, bien qu’elles aient pour la plupart une bonne vue. Imaginez, l’écholocalisation de certaines espèces de chauves-souris permet de distinguer un cheveu humain à dix mètres de distance! De tels atouts sont d’autant plus utiles lorsque vous chassez de petits insectes au vol, comme le font plusieurs de ces petits mammifères.

Lorsqu’une chauve-souris chasse un insecte, elle augmente la fréquence de cris émis afin d’obtenir plus grande précision sur la localisation et le mouvement de l’insecte et ainsi augmenter ses chances de capture. La fréquence de cris produits dépend également du milieu dans lequel elle se trouve. Dans un milieu plus ouvert, tel qu’un champ, la chauve-souris espacera davantage ses cris qu’en milieu forestier, où il y a un plus grand nombre d’obstacles. Plusieurs espèces limiteront l’émission de cris à la sortie du gîte afin de minimiser le risque de prédation.

Figure 3 : Six espèces de chauves-souris présentes dans plusieurs province du Canada ainsi que la fréquence moyenne et maximum de leurs cris, © Illustrations d’Antonin Saint-Jean, Guide pratique pour la conservation des chauves-souris en milieu agricole

L’écholocation peut permettre de distinguer les différentes espèces de chauve-souris. Les paramètres des cris émis d’une espèce à l’autre sont souvent très différents. Au même titre que l’on peut identifier des oiseaux grâce à leur chant (Figure 3), l’enregistrement des cris d’écholocation des chiroptères est un outil qui sert à répertorier les espèces. Toutefois comme les cris des chauves-souris ne sont pas audibles à l’oreille, il est nécessaire d’utiliser un appareil qui capte les ultrasons (Figure 4 et 5). Le prix de ces appareils demeure toutefois dispendieux soient entre 450$CA et 8000$CA pour des modèles professionnels.

Figure 4 : Anabat Walkabout, ©Titley-Scientific
Figure 5 : Échomètre avec application pour cellulaire de Wildlife Acoustics, ©Wildlife Acoustics

Ces appareils sont développés pour enregistrer les signaux d’écholocation et permettre de visualiser sous forme de sonagramme la durée, la fréquence et la forme des cris afin ultimement d’identifier l’espèce (Figure 6).

Figure 6 : Les sonagrammes typiques des huit espèces de chiroptères présentent au Canada, ©GCQ.

Il n’en demeure pas moins que certaines espèces sont difficiles à distinguer sur la base de leur sonagramme. Les espèces genre Myotis, incluant notamment la chauve–souris nordique, la petite chauve-souris brune et la chauve-souris pygmée de l’Est, ont des cris qui sont souvent difficiles à différencier. Ce qui est d’autant plus vrai sachant que leurs cris peuvent varier légèrement selon le milieu dans lequel elles se trouvent ou selon l’action qu’elles réalisent. Lors de la capture d’une proie, le cri sera adapté selon les différentes phases, soit la recherche de la proie, l’approche et ultimement le « feeding buzz », une séquence de signaux très rapprochée qui permet d’attraper l’insecte (Figure 7). Lors de l’identification, il faut également tenir compte de la pollution sonore, car plusieurs autres sources d’ultrasons peuvent ajouter de la distorsion ou biaiser les résultats, notamment les lignes à haute tension, les chutes d’eau et d’autres espèces animales comme les polatouches. L’identification acoustique doit donc être effectuée par des professionnelles. Toutefois, il y a de plus en plus d’appareils incluant des outils d’identification automatisée qui permettent de faciliter le processus et d’impliquer les participants de science citoyenne. L’identification automatisée a néanmoins certaines limites et nécessite d’être validées par des experts.

Figure 7: Les différentes phases de cris émis par un individu en période d’alimentation, ©GCQ.